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samedi, novembre 27, 2004

je ne sais pas forcement raconter les evenements artistiques, alors je suis desolee d'avance si ce n'est pas passionnant.
mais l'evenement etait tres beau.
hier soir au cafe independants - avec un "s" mysterieux - il y avait une soiree avec quatre concerts. j'ai oublie les flyers a la maison donc vous n'aurez que le nom d'eric cordier, le francais en tournee qui est dans le kansai (la region osaka kyoto) pour quelques jour encore et au japon en tout pour un mois et demi. (eric cordier japan tour'04 est le nom plein d'originalite de l'evenement).
hier, la premiere intervention commencait a 19h30 par un type qui a du etre torture par ses camarades de classe et qui se venge en enfermant des gens dans une piece (en les faisant payer) et en leur jouant de la musique tres tres forte et stridente qu'il produit a partir d'un clavier electronique, au risque de leur faire perdre de l'audition. tres agacant.
ensuite, la performance d'eric cordier, ensuite un type qui aurait pu etre interessant (dans un style aussi assez peu minimaliste de bruit, et un couple nippono americain pas mal malgre l'accent ignoble du eric x (lui aussi eric), ou deux individus jouaient l'un un son assez strident, ou tres repetitif de musique electronique assez maitrisee tandis que l'autre ajoutait des melodies douces et tres reposante, un melange interessant meme si un peu lassant. le plus drole quand on a deux personnes derriere des lap tops avec des sons tres differents, ainsi, c'est qu'il est difficile de savoir qui joue quoi a un instant donne. qui est la brute et qui est le magicien ? :)
sinon, eric cordier, est arrive apres le premier fou agressif.
d'abord il s'est mis tout nu, mais a aucun moment, ni au debut ni par la suite, la nudite ne semblait un procede (infiniment trop utilise dans les performances a mon gout, et pourtant dieu avec un petit d sait que j'aime voir des hommes nus). deja, eric a un corps tres particulier, longiligne qui semble meme celui d'un geant par instant, les cheveux tres longs (selon les moments, pareil, ils pouvaient avoir l'air d'une chevelure immense ou d'etre juste a mi-dos, selon les positions). il n'a pas de poils visibles en dehors de ces cheveux, ses sourcils et ses poils pubiens. guillaume parlait d'un corps ou tout est dessine sans que ce soit le fruit d'un travail et il est vrai que tout du long de la performance on voyait tres bien ses cotes se soulever sous l'effet de la respiration, ses os, ses organes. peu de muscles, ou du moins pas ceux que je vois habituellement sur des humains, tres surprenant donc (attention, pourtant, pas de doute : c'etait un humain :) ).
il a tout d'abord il a pris deux micros qu'il a promenes sur son corps, faisant des sons de frottement puis obtenant des sonorites de plus en plus mysterieuses a mesure qu'il passait sur le ventre, la gorge, il a finit dans la bouche, ou sa respiration etait enorme dans notre silence, puis il a pose les micros et s'est dirige vers le fond de la salle. pour l'instant, il s'agissait de musique avec des capteurs particuliers. il a pris deux *electrodes* ou quelque chose comme ca (ne pas esperer de detail technique de ma part) et les a mis dans sa bouche avant de commencer a danser. disons, c'est a cet instant que je me suis dit "il danse bien".
il a donc fait des sons tres angoissants avec sa bouche, gutturaux sera le seul adjectif qui me viendra et s'est recorqueville et a ouvert son corps, a fait des galipettes dans un ralenti improbable (faisant reculer le spectateur du premier rang qui avait peur de voir ses fesses en gros plan). ses cheveux s'enroulaient autour de lui tandis qu'il etait au sol, plus ou moins foetal, plus ou moins tordu, assez rarement franchement entier, debout (et la seule fois ou son nombril nous regardait pendant qu'il haletait, la tete en arriere et les mains legerement ecartees, j'ai un peu honte de mon manque d'originalite, mais j'ai vu une figure christique, ce qui et quand meme une caricature quand on voit un typ nu et maigre a cheveux longs sur une scene, mais on n'est pas responable de ses emotions).
les sons etaient respiratoires et de longues plaintes. ce n'etait pas tres gai, et il se debattait perpetuellement dans un enfermement dont on ne semblait guere pouvoir le tirer, mais il ne semblait rien demander de toute facon. les rares moments d'ouverture n'etaient jamais vraiment une liberation (pour moi) car ses mains etaient atrocement crispees, tordues et laides, vraiment. tout du long. alors que ses mouvements et postures, malgre les sons dechirants, etaient parfois harmonieux et agreables. il a fini par une marche qui m'a un peu fait du bien (la souffrance exprimee etait dure par moment) en marchant comme un canard, un peu drole, qui faisait sortir de cette fascination pour un monstre au fond d'une caverne de solitude. il m'a semble par exemple qu'il n'ouvrait jamais les yeux, etait face a nous sans jamais nous percevoir. une face d'animal de grotte aveugle, genre chauve-souris. notons que meme quand il marchait comme un drole de canard, un de ses bras coincait l'autre dans son dos. il y avait toujours une partie du corps qui allait mal.
je l'ai observe pendant les performances qui suivaient, il etait tres grand dans la vie reelle aussi, et tres mince, et se tenait tres droit d'apparence un peu crispee, comme un danseur de danse contact que j'ai connu aux etats-unis, un peu comme mon pote cynik de marseille, qui est aussi grand et mince et qui malgre sa souplesse (eric cordier aussi est tres souple vu ce qu'il fait) evoque une grande rigidite dans le port de tete. c'est etrange. il a une tete plutot marquee, mais qui n'est pas jeune ni vieille - enfin quand meme pas tres vieille. il a alternativement l'air tres doux et tres dur. vraiment, etrange c'est la sensation qu'il a produite sur moi pendant les rares instants ou nous avons communique. sympathique, mais qui n'a vraiment vraiment vraiment pas besoin de discuter.
on ne sait pas bien comment ca fonction techniquement (perso ca ne m'interesse guere, mais c pourrait interesser quelqu'un), donc, si quelqu'un fait les reglages de ses capteurs bucaux ou si c'est lui qui mixe tout du long en manipulant avec la bouche, mais la diversite des sons etait enorme, meme si elle etait souvent du cote du caverneux triste.
il faut comprendre qu'en comparaison la masturbation des adolescents mal finis qui passaient juste avant et juste apres manquait beaucoup de force et de radicalite. il ne faut pas s'arreter au milieu du chemin.

sinon, j'ai reussi a decrocher pendant les autres performances, pour remarquer un cuisinier tres beau derriere le comptoir, les manches de son pull noir retroussees jusqu'aux coudes, un tablier rectangulaire un peu plus clair sur le torse (on ne le voyait qu'a partir du bas de la poitrine), des cheveux touffus et une nuque penchee tres frele. en dehors du fait que c'etait un joli jeune homme delicat comme seuls savent l'etre les japonais a mes yeux, c'est a dire delicats et fins sans etre appretes, il avait surtout une gestuelle superbe, encore une fois comme les japonais(es). le quotidien semble etre ici une affaire fondamentale, couper le poisson un travail qui demande une attention absolue, un serieux sans borne. il etait la decoupe du poisson (je suppose que c'etait cela au vu des gestes), ce qui me laissait profiter de son cou dont j'ai deja dit qu'il etait gracile. (il fallait bien s'occuper, autant regarder). a un moment il est intervenu dans la dernier performance quand le son etait assez bas, il a moulu du poivre et ca tombait parfaitement. je l'ai entendu car je le regardais, ca enrichit la perception, mais j'ai vu qu'eric qui regardait le spectacle a sursaute et s'est tourne lentement vers la source de la nouvelle rythmique. j'ai bien aime.
son autre participation, c'etait la presence des odeurs de nourriture. guillaume plaisantait en disant apres une des debauches de bruits agressifs "vous voudrez bien me montrer la carte des thes..." - c'est assez original de sentir l'ail et la friture (plutot apetogene) dans des concerts experimentaux.

je voulais preciser quelques points.
si j'ai eu honte hier apres l'histoire du velo, c'est qu'en sortant du centre, ne voyant pas la bicyclette, j'ai pense "bon, alors, quelqu'un s'en est occupe, ou est-ce qu'il me l'a range ?". je SAVAIS que quelqu'un en avait pris soin, l'avait bien traite, et m'attendait pour me le rendre. je n'avais pas du tout de remord d'avoir refile un ennui a quelqu'un. et de n'avoir aucun reproche m'a montre combien je profitais de cette forme de gentillesse quotidienne, qui n'est pas partout mais nous rend tout de meme la vie si douce dans ce pays.
mon sondage recent le montre : tous les europeens et les nord-americains rencontres louent le manque de stress. profitons-nous ?
pour ce qui est de profiter, la question de savoir ce que c;est que travailler au cnrs, le sens social que l'on a et combien on profite, en etant ici, en produisant meme deux papiers par an qui son lu par vingt personnes sur terre (et je ne les fais pas en ce moment) - et s'ils sont lus par plus, ils sont en general dangereux car interpretes a la louche, parfois a contre-sens, car ils sont affaires de specilalistes qui prennent des precautions qu'eux seuls comprennent dans l'enonce de la "verite". nous sommes dangereux quand nous ne sommes pas inutiles. et etre au japon, detendues, voir les feuilles des arbres changer de couleur dans les temples (il parait qu'il existe un parcours precis, disponible a l'office du tourisme, qui explique comment organiser les deux mois d'automne pour suivre au mieux le jaunissement des arbres, les temples etant loalises a des endroits divers et ayant des especes qui reagissent plus ou moins vite au froid), c'est encore plus allie l'inutilite a la paresse, a un plaisir personnel.
et malgre tout, il me semble qu'il y a un sens a venir aussi loin pour trouver l'alterite absolue (mystere qui s'epaissit chaque jour un peu plus) tandis que la forme exterieure ressemble tant a notre quotidien - voitures, micro-ondes, tele, portable, toilettes et douches, ... ce n'est pas l'alterite africaine, c'est quelque chose qui nous ressemble incroyablement sur tout le vingtieme siecle, a quelques exceptions pres (les robots, ici, ce ne sont pas que les bras des usines de montage automobiles, mais aussi le robot sony a qui on peut apprendre a parler ou le toshiba (c'est bien toshiba ?) qui imite les mouvements qu'on fait devant lui).
et puis c'est cette immense economie ou le don est reconnu comme fondamental dans la societe, alors que chez nous on nie son importace dans la circulation des biens, la repartitioin des richesses, la construction des motivations, et qu'elle reste anecdotique. taboooooo. (il n'y a qu'a voir qu'on donne une prime de noel aux chomeurs, ce que je trouve debile. on ferait mieux de leur donner de quoi vivre dans l'annee, et d'oublier cette connerie de consommation ostentatoire des jours de neige).

enfin, il faut savoir que je ne fais pas que des choses bien ou neutre ici, que je ne suis pas qu'observatrice. l'autre jour, a l'aikido, j'ai fait mal a une jeune femme sur qui mon shihonage ne passait pas. sans le vouloir, je lui ai fait un arm lock qui aurait pu etre blessant et n'a ete que douloureux. je ne voulais pas, mais je n'avais pas non plus a desirer que le mouvement passe, de facon si obsedante que j'ai failli etre dangereuse.
je n'etais pas du tout contente de moi, je ;e suis sentie peteuse, d'autant que nous travaillions a troism et que donc ce n'est pas reste entre elle et moi, et que le type m'a tancee.
je n'etais pas a l'aise.
ceci dit il a tout de suite decide de me "punir" (?) ou de m'empecher de recommencer. il m'a fait un shihonage n m'arrachant a moitie l'epaule. puis m'a fait le signe ou l'on croise les avants-bras pour signifier "interdit".
je ne sais pas si c'est le mode educatif ici, mais faire mal a quelqu'un qui a fait mal, tout ca parce qu'on est assez puissant pour le faire.... je n'ai pas reconnu l'aikido la-dedans.
le type m'a mal regarde par la suite, et je pense qu'il se sent dans son droit.
je ne sais que penser. je ne suis pas fiere, mais je ne sais vraiment pas.


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