<$BlogRSDURL$>

mercredi, septembre 28, 2005

le mensonge 

je mens à mes lecteurs sans cesse, en bidouillant les dates d'édition du blog, faire oublier mes manquements et mes retards, voilà mon principal souci. le blog pèse plus à celui qui l'écrit qu'à celui qui le lit en ce moment. on se perd dans des contradictions internes. le désir de rester dans un pays où la vraie raison de la présence (la pratique martiale) apporte plus qu'on ne le souhaiterait, amenant à imploser un peu sous la pression d'un apprentissage trop complet ; où le plaisir dilletante lié à la découverte d'une langue qui marche la tête à l'envers est immense et quotidien, despérant et drôle ; où certaines amitiés adultes reconfortent étrangement par une sensation de confiance calme. le désir de construire chez soi, à la maison, le sens qui manque quand on vit comme une étrangère, quand on donne du bout des doigts électronique et qu'on ne participe pas à constuire des îles (essayer de) au milieu du naufrage idéologique et écologique international. on peut vivre comme des enfants toutes sa vie, finalement, c'est assez simple et personne ne le reprochera en ce moment.
je refais le monde en parlant du japon. p.b., un professeur, il y a quelque temps, m'a dit "je ne dis plus rien sur le japon, car ma vision évolue à chaque fois que j'y viens". j'y viens chez lui signifie un ou deux mois par an depuis 20 ans, et il parle un peu, lit un peu (et un peu n'a l'air de rien, mais signifie toujours ici une immersion très importante). je garde toujours sa phrase en tête, en me demandant si elle ne s'applique pas à tous les groupes humains, à tous les individus, à toutes les situations ; mais comme je n'ai pas peur des mots, je me permets de donner des avis et poser des phrases qui se contredisent d'un jour à l'autre. alors j'ai discuté avec olivier, un nouveau jeune collègue de ma belle institution mère, tout nouvellement recruté, et qui entretient des liens forts et professionnels avec le japon. et nous n'étions pas d'accord sur la notion de groupe, peut-être, de société, de solidarité, d'économie et avec un regard sur des objets similaires, ne portions jamais les mêmes conclusions. Peut-être est-ce parce qu'à travers l'aikido je m'étais habitué depuis longtemps à la notion de responsabilité individuelle, qui exclut de façon définitive l'idée que la charité est une forme de redistribution necessaire et légitime de la société. Si les gestes sont différents pour la redistribution des richesses, ici (donner du travail à tout le monde, traditionnellement, avec difficulté à effectuer une transition vers un état stable quand ce processus n'est plus possible) les logiques qui la sous-tendent sont aussi d'un autre ordre, puisque l'on dit bien qu'il faut appartenir et que celui qui est dehors n'existe pas. une solidarité forte et une construction identitaire possible seulement à l'intérieur d'un groupe, avec un coût d'entrée dans ce groupe qui est inimaginable pour des français qui ne sont pas passé par des classes prépa (anciennement) ou médecine (je crois encore, même si les pratiques claniques sont un peu combattues chez nous maintenant). humiliation, lenteur dans l'ascension sociale, ostracisme légèrement aléatoire, reproduction subséquente vers les plus jeunes qui doivent eux aussi accepter des rites initiatiques qui leur mangent une énergie et un temps aberrants, tout cela est ici généralisé à la moindre activité et toutes les classes de la société, pas seulement aux cercles dirigeants. c'est largement choquant pour les enfants de la république. en tout cas ça crée des différences cognitives nettes dans la définition de l'échec social, de la reconnaissance d'un exclu économique comme un autre ou un soi, le racisme, et tout un tas de traits secondaires. nous parlions de ça et nous n'étions pas d'accord. et comme je ne suis pas d'accord avec le moi de la semaine dernière sur le sujet, je suis un peu perdue.
à chaque fois que je vais dans une conférence, les gens demandent ce que l'on doit choisir comme théorie sociale, et j'admire sans cesse ceux qui parlent d'une théorie sociale comme d'un objet stable, avec un début et une fin, des paradigmes et des causalités, des axiomes. c'est au-delà de ma cognition.
je tiens à préciser que j'écris ça en écoutant du tricky, mon oreille du moment, qui me réjouit par sa perversité cynique.

Comments: Enregistrer un commentaire

This page is powered by Blogger. Isn't yours?